Le Centre pour le Développement des Bonnes Pratiques en Santé (CDBPS), unité de recherche créée au sein de l’Hôpital Central de Yaoundé pour faciliter l’échange et l’application des connaissances issues de la recherche a organisé le 11 Novembre dernier au Centre Jean XXIII à Mvolyé – Yaoundé un forum délibératif sur le thème « comment accélérer l’adhésion des populations aux mutuelles de santé ». La quarantaine de participants venus des Régions du Nord-Ouest, du Littoral et du Centre et issus des administrations, de la société civile, de la plateforme des promoteurs des mutuelles de santé (MS), des instituts de recherche et des agences de coopération, a dialogué autour d’une note de synthèse des résultats de recherche sur les MS dans les pays en développement préparée par le CDBPS. Alors que les MS sont retenues depuis 2001 par le Gouvernement comme stratégie prioritaire de promotion de l’assurance maladie volontaire et de réduction de la forte proportion des paiements directs pour l’achat de soins et services de santé, le taux national de couverture reste en deçà de 2%. Selon une estimation de l’OMS (rapport statistique mondial sur la santé 2009), 95,8% des 600 milliards dépensés par les camerounais pour financer leur santé en 2007 l’étaient sous forme de paiements directs au moment d’épisodes de maladie.
L’objectif du forum était de permettre aux acteurs clés de la promotion des MS au Cameroun de dialoguer autour des raisons du faible engouement des populations pour ce modèle d’assurance maladie volontaire mais aussi des conditions et expériences de succès dans les pays en développement ; la finalité étant que les uns et les autres puissent exploiter les résultats de la recherche dans le choix éclairé des stratégies appropriées pour atteindre enfin la couverture de 40% de la population camerounaise fixée comme objectif à la stratégie nationale de promotion des MS d’ici 2015. Les travaux se sont déroulés dans une ambiance sereine sous forme d’ateliers autour de l’ampleur de la problématique des MS, les résultats de la recherche et les options stratégiques pour accélérer l’adhésion des populations aux MS au Cameroun. Les points de consensus suivants ont émergé de ce dialogue :
1. Les mutuelles de santé sont et doivent être considérer non seulement comme une priorité mais une véritable nécessité pour libérer les camerounais de l’angoisse de la maladie et de son risque de dépenses catastrophiques poussant un grand nombre dans la pauvreté en cas de maladie ;
2. Le laisser-faire actuel où l’initiative de créer les mutuelles est laissée aux seules communautés devraient s’inspirer des initiatives positives de coalition dans lesquelles certaines municipalités se sont engagées avec les responsables locaux de la santé pour offrir une assurance maladie aux populations ;
3. L’absence de cadre législatif, juridique et réglementaire facilitant et promouvant l’implantation et le fonctionnement des mutuelles de santé au Cameroun constitue l’une des principales sources du discrédit et de la suspicion dont sont victimes les mutuelles de santé
4. En effet, l’absence d’entendement commun du concept de risque maladie ; des bonnes pratiques et normes en matière de collecte des primes et d’achat des soins et services de santé et de normes sur le paquet de soins couverts et la qualité des soins entretiennent chez les populations dont près de 40% vit en deçà du seuil de pauvreté (55% en milieu rural) une réticence forte vis-à-vis de ce modèle d’assurance maladie ;
5. Les populations y compris les élites politiques et les leaders d’opinion sont peu informés sur les avantages des mutuelles de santé et ceux qui le sont ne croient pas à la capacité des mutuelles de santé à garantir une couverture universelle du risque maladie ;
6. Les paiements directs et la manipulation de l’argent liquide dans les formations sanitaires favorisent les pratiques de corruption ;
7. L’instauration d’un ticket modérateur dans les formations hospitalières, l’implication des prestataires de soins au niveau local et la mise en place de mécanismes forts de contrôle social pour améliorer la gestion de ces mutuelles et sanctionner les comportements déviants encouragerait les populations à s’inscrire ;
8. Le paiement des frais d’adhésion et des primes devrait flexible pour s’adapter aux modalités de production économique locale surtout en milieu rural ou en milieu urbain pour les acteurs du secteur informel qui représentant plus de 80% de la population urbaine ;
9. Compte tenu du niveau actuel de dépenses mensuelles de santé des ménages et de leurs ressources monétaires, une large proportion des ménages camerounais est incapable de payer leurs frais d’adhésion et les primes ; il est approprié d’envisager des mécanismes de subvention pour permettre aux ménages pauvres et indigents de payer leurs primes ;
10. Les médias ont un rôle critique à jouer pour informer et éduquer les populations sur les avantages des MS.