Enjeux éthiques du dépistage en santé ! tel a été la thématique qui a réuni les fidèles du café éthique de l’Hôpital Central de Yaoundé et meublé deux heures d’échanges durant lesquelles l’on a abordé tour à tour les questions relatives à la définition du dépistage en santé, justifier son importance et son actualité et pardessus tout, en dégager les aspects éthiques.
Mais qu’est-ce donc que le dépistage en santé ? Quelles en sont les considérations et/ou les aspects éthiques ?
Définition et contextualisation - D’une manière globale en santé, le dépistage est considéré comme une intervention de santé publique pour identifier les personnes à risque de développer une maladie ou de souffrir d’une condition particulière pour laquelle il peut y avoir une solution de santé publique ; soit alors pour dépister une maladie avant qu’elle ne se manifeste cliniquement ou alors une maladie à un stade dit précoce ; dans le but de diminuer la charge morbide, le nombre de personne malade ou alors de réduire la mortalité.
Le dépistage peut revêtir deux formes : soit il s’agit d’un échange entre un soignant et son patient soit alors d’un examen biologique ou d’imagerie médicale visant à identifier une situation à problème.
Les enjeux éthiques du dépistage en santé - Cet état des choses soulève une multitude de questions (partant de celle relative aux conflits qui peuvent naitre du dépistage ou qui méritent d’être adressées parce présentant de grands enjeux éthiques non-négligeables. En ce sens que si le but du soin est de ne pas nuire, est-ce que selon les règles enseignées (théoriques) en santé publique et dans la logique du dépistage nous restons dans cette logique de ne pas nuire ? ces questions d’ordre éthique sont perceptibles à différents niveaux :
· Dans la relation entre soignant et patient ;
· A propos des dispositions envisagées pour une meilleure prise en charge des personnes porteurs de la maladie le cas échéant ;
· Des risques courus en s’engageant à faire un quelconque dépistage.
Les enjeux sont alors de plusieurs ordres :
Ø Enjeu sécuritaire : risques pris en allant se faire dépister ; le dépistage pouvant engendrer un certain nombre de conflits (caractère conflictuel du dépistage) ;
Ø Enjeu d’une meilleure prise en charge ;
Ø Enjeux autours du processus de dépistage : s’agit-il d’un dépistage volontaire ou d’un dépistage de masse ? obligatoire ? individuel ?
Ø Enjeux autour des techniques de dépistage ou test de dépistage : prise de sang, analyse d’urine, le frottis du col, la mammographie, le scanner du thorax (chez les tabagiques), prise de sang chez l’enfant, prise de sang chez les fiancés (pour identifier s’il y a des problèmes de drépanocytose) ;
Ø Enjeux liés à la typologie de la population testée ou dépistée : cas des embryons (pour rechercher la trisomie par exemple), des personnes âgées, chez les nouveaux nés – les personnes ici n’ont pas la capacité de s’auto-déterminer. Cela peut donner lieu à des discriminations ;
Ø Enjeu lié à la finalité ou au but du dépistage : la problématique de cette finalité ; - la finalité étant la diminution de la mortalité ou de la morbidité (bénéfice du dépistage).
Le dépistage en santé et le principe du « primum non nocere » : l’annonce du résultat après le dépistage peut nuire à la personne : est-ce que le consentement est véritablement éclairé ?
Le dépistage vu par la santé publique
Ici il faut pouvoir répondre au préalable à un certain nombre de questions ; savoir s’il s’agit :
D’une maladie fréquente ; d’une maladie grave ; d’une maladie dont l’histoire naturelle est connue ; s’il existence un test performant y compris des examens complémentaires ; et enfin si le traitement est accessible ;
Au-delà, c’est davantage l’occasion de s’interroger sur : Quelles sont les données probantes que nous avons dans notre contexte quand nous lançons des campagnes de dépistage ? Quelle est la proportion de faux positifs ?
Aspects éthiques du dépistage en santé
Ces aspects sont relatifs à :
- L’autonomie des personnes vis-à-vis du dépistage ; celle-ci soulève simultanément les questions d’adhésion ou de non-adhésion de la population aux propositions de dépistage ; car en effet, la participation à un dépistage est basé sur le respect de la liberté individuelle et sur le principe de l’autonomie.
- La question du rapport bénéfice – risque : elle fait allusion au fait que l’efficacité intégré d’un dépistage doit entrainer la notion de non malfaisance, c’est-à-dire l’impératif premier de ne pas nuire aux personnes en optant pour des bénéfices collectifs supérieurs aux risques individuels.
- La question éthique de l’identification lorsqu’on choisit des groupes cibles : ici il faudra être regardant sur la discrimination raciale avec risque de stigmatisation ; l’évaluation du dispositif de dépistage pour assurer l’adaptabilité du programme de dépistage ; et enfin, mettre l’éducation au service de la promotion de la santé afin d’accroitre l’autonomie des personnes et la capacité à faire des choix favorables à la santé en respectant la liberté individuelle et en promouvant la responsabilité des personnes et des démarches citoyennes.
Au demeurant, les repères éthiques pour le dépistage sont ceux de : de la recherche d’un idéal de société ; de la réduction des conséquences négatives du dépistage pour les participants ; de la confiance ; de la transparence et de l’évaluation des conséquences.
Contributions et questionnement – ils ont consisté sur les points ci-après :
- La nécessité d’une prise en compte de l’aspect communicationnel lors des campagnes de dépistage : cet aspect se rapporte à la gestion de l’information avant, pendant et après (obligation de rendre l’information à l’individu) le dépistage ; il implique les exigences de vérité, véridiction, sincérité et même de bonnes pratiques.
- La prise en compte des aspects économiques et financiers du dépistage, ceci davantage pour ce qui est des individus ou des populations (éviter de faire dépenser les personnes pour rien).
- Le dépistage dans la médecine traditionnelle : existence, appellation et techniques ou procédés.
- L’aspect reglementaire du dépistage pour exprimer la nécessité de légiférer sur la question du dépistage obligatoire et la règlementation sur la prise de décision après les résultats du test.
- La dimension des autotests.
- L’aspect du « marketing stratégies »