Face à l’injonction contemporaine qui veut qu’on puisse « acheter éthique, parler éthique, placer éthique et gouverner éthique » on est dans l’obligation de converger vers l’idée que cette usage multiforme traduit soit un engagement profond au service d’une cause humanitaire ou juste un faire valoir de luxe. C’est au regard des règles et obligations récemment développées au nom du bien qu’il est important de garder à l’esprit les aspects cruciaux de notre rapport aux autres particulièrement ceux qui sont fragiles et vulnérables.
Morale et Ethique: La distinction entre morale et éthique n’est pas imposable sous une approche étymologique, les deux renvoyant à l’idée des mœurs. Paul Ricœur désigne la morale comme l’ensemble des normes qui régissent les comportements sociaux et individuels qui les autorisent et qui font qu’un acte est moral ou pas. La morale est donc obligatoire, marquée par des règles, des impératifs et des interdictions. Hétéro-régulatrice, elle a une exigence d’universalité et un effet contraignant. La distinction entre morale et éthique est appréciable même si dans la morale on retrouve l’éthique et vice versa, la morale est structurée et il peut y avoir une punition. Parce qu’il y’a une dimension historique qui traduit l’évolution des pensées et des hégémonies culturelles, Paul Ricœur définit la visée éthique par trois composantes : c’est vivre bien avec et pour les autres dans les institutions justes. L’éthique est une manière d’agir qui cherche le bien, c’est une démarche auto régulatrice où le raisonnement est priorisé.
Droit : la notion de Droit est rendue complexe en ce qu’il suppose des libertés et des prérogatives, la liberté dans cet ordre d’idées renvoie au contrôle de sa propre santé et son corps et d’être consentant au soin et également les droits d’accès. Il faut questionner l’esprit de la règle par rapport au contexte Camerounais où les choses sont changeantes par rapport à l’approche santé fondée sur les droits de l’Homme (la non discrimination, la disponibilité, l’accessibilité, l’acceptabilité, de qualité, de responsabilité). Autrement dit comment appliquer l’universalisme sans l’individualisme.
La déontologie est un cadre où les règles et devoirs d’une profession sont fixés. Les questions autour des différents concepts définis ont une dimension individuelle qui impose une intégration. La déontologie ne s’applique pas à la science du devoir en général au sens de Kant, c’est une fondation transcendantale respectueuse de la liberté de l’individu. En d’autres termes, c’est une approche empirique des divers devoirs relatifs à une situation sociale. Elle est généralement codifiée sous forme de préceptes ou articles crée un rapprochement avec le droit. Son pouvoir de contrainte est problématique et son autorité reste limitée à un cercle socio professionnelle limité. La déontologie professionnelle se situe donc à mi distance entre la morale à laquelle elle se rattache et le droit dont elle se donne les apparences.
Une perspective actuelle autour du droit à la santé et des droits de l’homme dans la santé convoquent des éléments codifiés tels que la Déclaration sur les droits du malade produites par l’Association Médicale Mondiale et le dernier Code éthique. Ces documents sont les bases à partir des quelles on peut désormais juger du comportement du soignant au niveau mondial. Ces évolutions conjuguées aux soucis d’universalisme bien que contextuel ou local faire croitre la complexité du métier de soignant. Le soignant doit désormais se poser les questions suivantes : quels sont les droits du malade ? Les connait-il ? Est-ce que je les connais ? Dans quelle dimension pouvons-nous rentrer en relation sans qu’il y ait abus de pouvoir ?
« Chaque soignant dans son concert avec un patient devra avoir toutes ces notions claire à l’esprit pour que le soigné soit relevé et le soignant soit heureux d’avoir relevé le soigné. Le soigné reconnait-il qu’il est soigné ? Est-ce que les propos injurieux ou violents envers le soignant n’influencent-il pas l’attitude du soignant ? » dixit Pr Pierre ONGOLO.